L’inceste est réprimé dans le code pénal helvétique depuis 1942. La condamnation morale est claire et forte au premier abord, mais l’accueil de la parole des victimes est resté précaire face à la figure dominante du père et chef de famille bien souvent coupable du crime. Dans l’ouvrage collectif Dire entendre et juger l’Inceste, Cristina Fereira publie une enquête sur les fauteurs d’inceste en Suisse romande dans les années 1960 et 1970 à partir d’une série de dossiers d’expertises psychiatriques. Cristina Fereira est sociologue et professeure à la Haute Ecole de santé Vaud.
La famille traditionnelle est un élément fondateur de la société humaine, pour l’Eglise catholique en particulier, qui est aussi un témoin privilégié du dysfonctionnement des familles et à ce titre une actrice de l’histoire dans les cas d’inceste qu’on lui révèle. Inès Anrich s’est penchée sur ces affaires au XIXème siècle, où les victimes font appel à l’aide de l’Eglise.
Alors qu’il est souvent passé sous silence dans la vie quotidienne, au XVIIème siècle, l’inceste devient la matière de nombreux récits dans les premiers journaux. Marianne Closson est maitressse de conférence en littérature à l’Université d’Artois. Elle a retrouvé ces feuilles où l’inceste se raconte au présent, avec les premiers pas de la presse à sensation, alors que l’inquisition et les chasses aux sorcières ne sont pas loin.
Après le XXème siècle et l’affaire Violette Nozière, nous vous proposons un voyage dans le temps, pour remonter aux sources du silence sur l’inceste avec l’historien Didier Lett, spécialiste des liens de parenté, des relations entre frères et sœur. Pendant toute sa carrière, il a travaillé sur l’histoire de la famille. Dans l’ouvrage collectif Dire et entendre et juger l’inceste, il écrit sur les procès pour viol incestueux du XIVème au XVème siècle.
L’affaire Violette Nozière, dans les années 1930, est un des cas les plus médiatisés d’inceste, parce qu’elle a donné la matière d’un film signé par un monstre sacré du cinéma français : Claude Chabrol. C’est pourtant une affaire où la dénonciation de l’inceste a été écartée par la justice. Anne-Emmanuelle Demartini, historienne, autrice de Violette Nozière, la fleur du mal, Une histoire des années trente a co-dirigé l’ouvrage Dire, entendre et juger l’inceste.
Comment l’inceste criminel était dit, dénoncé, décrit, voire jugé et puni dans les tribunaux criminels du royaume au XVIIIe siècle ? Avec quels mots ? A quelles fins ? Pour dénoncer quels actes ? Outre ces enjeux de dénomination et de qualification, il s’agira de déterminer sur quels critères de genre et d’âge l’inceste pouvait (ou pas) être assimilé à une forme de violence sexuelle intrafamiliale au XVIIIe siècle.
Dans l’Ancien Régime, l’inceste désigne la sexualité criminelle d’un couple d’une même famille. La justice ne distingue alors pas l’agresseur de la victime. À partir du 19e siècle, ce crime sans nom renvoie de plus en plus dans les discours à une violence sexuelle orientée sur l’enfant.
L’ouvrage « Dire, entendre et juger l’inceste » expose les discours, les pratiques et les significations auxquelles l’inceste a donné lieu depuis son interdiction par le christianisme médiéval européen.
Le procès de Mazan nous amène à nous interroger sur l’efficacité du droit et la pénalisation du viol. Ce crime est sévèrement puni par la loi depuis des siècles mais ses auteurs sont rarement condamnés.
Postface de Dire, entendre, juger l’inceste, du Moyen Age à aujourd’hui, un ouvrage collectif sous la direction d’Anne-Emmanuelle Demartini, Julie Doyon et Léonore Le Caisne à paraître le 18 octobre 2024 aux éditions du Seuil.
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