Comment se saisir des armes de la littérature pour nous faire justice ? Si elle ne l’a pas sauvée de ses traumas, l’écriture de Neige Sinno a cette force qui pourrait aider beaucoup d’entre nous pour survivre à l’ampleur des violences sexuelles. Dans Triste Tigre (éd. P.O.L, 2023), la lauréate du Prix Femina 2023 nous plonge dans sa tête pour réfléchir à l’inceste qu’elle a subi lorsqu’elle était enfant.
Nous faire justice / Les Couilles sur la table – Binge
🗣 »J’écris pour leur dire : vous n’êtes pas les seuls, moi aussi je suis seule. Nous partageons cette solitude. Nous sommes ensemble dans cette solitude. »
Merci encore à Neige Sinno de faire entendre sa voix par ce texte fort, sur un sujet qui nécessite de se faire entendre. pic.twitter.com/PmRsPZ0vWV
Neige Sinno est sans conteste l’événement de cette rentrée littéraire. Elle a fait sensation avec son ouvrage « Triste tigre » qui pourtant est on ne peut plus dur puisqu’il traite de l’inceste dont elle a été victime par son beau-père lorsqu’elle était plus jeune entre ses 7 et 14 ans.
Encore un livre sur l’inceste après l’implacable Familia grande de Camille Kouchner paru en 2021 ? Oui, et c’est heureux, car même si la parole se libère peu à peu, ce crime reste bien trop répandu dans le secret de milliers de familles, blessant pour leur vie entière des milliers d’enfants.
Victime d’abus sexuels au sein de sa propre famille, Grégoire Delacourt n’avait jamais été aussi loin dans la révélation de sa propre histoire. En 2012 un journaliste avait perçu « l’enfant mort » en lui. Il lui a fallu arriver à son dixième roman, « L’Enfant réparé » (éd. Grasset), pour oser dire et révéler à lui-même l’enfant « dévoré » qu’il a été. Un enfant aujourd’hui réparé par l’écriture. (Durée : 13 min)
Dans « L’enfant réparé », Grégoire Delacourt raconte sa tentative de « guérison » après des années d’amnésies traumatiques liées à l’inceste qu’il a subi enfant.
Le personnage central de La Familia grande n’est pas le beau-père, le « mari de ma mère », qui jamais ne sera ni nommé ni prénommé, mais Évelyne, Madame Pisier, notre mère, ma mère, maman, ma maman, mon Évelyne, mon Évelyne à moi, maman chérie, ma mamouchka, déclinaisons de tendresse et d’amour, litanie poignante comme pour bercer le grand chagrin, la perte irrémédiable, vécue par celle qui, à plusieurs reprises, a perdu sa mère. Au-delà de la terrible « révélation » qui a focalisé toute l’attention médiatique, il faut lire ce récit puissant.
Camille Kouchner, Vanessa Springora ou encore Sarah Abitbol : de plus en plus de Françaises optent pour l’écriture d’un livre plutôt que pour un message sur les réseaux sociaux pour raconter les agressions sexuelles qu’elles, ou des membres de leur entourage, ont subies. Un phénomène qui trouve aussi écho au Québec dans les dernières années. Le livre serait-il la voie idéale pour libérer la parole des victimes et briser les tabous ?
Entre emprise incestueuse et discours libertaire, entre désir de littérature et campagne médiatique, entre culture de Cour et quête d’émancipation, le scandale provoqué par la sortie de « La Familia grande » révèle les contradictions d’un monde de pouvoir où l’endogamie est la règle.
Intervenants : Raphaëlle Bacqué (grand reporter au quotidien « Le Monde »), Marie Dosé (avocate au barreau de Paris), Raphaël Enthoven (philosophe)
Le 31 mars dernier, Francesca Gee témoignait dans le New York Times avoir été l’une des maîtresses mineures de Gabriel Matzneff. Début avril, elle racontait dans « Marianne » en quoi ce dernier était « le produit de tout un système ». Aujourd’hui, elle revient sur les polémiques du moment via un détour par « Lolita » de Nabokov.
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